Auguste Escoffier, le père de la gastronomie française
Devenu légende dans l’univers de la gastronomie française, le grand chef cuisinier français Auguste Escoffier a révolutionné les cuisines des grands restaurants et, plus généralement, l’art culinaire. Il a de nombreux disciples à travers le monde, dans les plus grands palaces. De la grand-mère fin cordon-bleu à la World Association of Chefs’ Societies, découvrez le parcours du grand maître.
La cuisine dans les gènes
Alors que son père était maréchal-ferrant, Auguste Escoffier aurait dû devenir également forgeron. Mais les gènes ne trompent pas. Avec une grand-mère fin cordon-bleu et des oncles et tantes dans la restauration, il ne pouvait que répondre à l’appel des cuisines.
C’est d’ailleurs chez l’un de ses oncles restaurateur qu’il fait ses débuts, à l’âge de 13 ans, dans un établissement niçois nommé Restaurant Français. Il y reste 4 ans, le temps de faire ses classes. Il poursuit son apprentissage comme première aide puis comme chef de cuisine dans plusieurs restaurants. Puis il est embauché au prestigieux Petit Moulin Rouge, où mûrit sa vocation de chef de brigade d’un grand restaurant.
Happé par la guerre contre la Prusse, il devient, en 1870, chef de cuisine pour l’Etat-Major de l’Armée du Rhin. Il met à profit son expérience pour rendre le quotidien des soldats moins rudes. Parallèlement, il montre ses qualités de manager. Il réorganise l’office et le service de façon très efficace et parvient à réduire ainsi l’attente des trois quarts.
Affecté ensuite au service du Maréchal Mac Mahon, il apprend à accommoder restes et ingrédients peu variés en recettes créatives.
A son retour, il repasse par le Petit Moulin Rouge comme chef des cuisines. Puis il devient son propre patron en faisant l’acquisition d’une épicerie à laquelle il adosse une salle de restaurant. L’expérience ne dure que 2 ans, mais il rebondit vite en prenant la direction de la Maison Chevet. Ce sera l’occasion pour le grand chef français de réaliser de grands dîners pour des hôtes prestigieux dans toute l’Europe.
Charles Ritz et Auguste Escoffier, une association au service de l’hôtellerie de luxe
A la fin du XIXe siècle, les villégiatures deviennent à la mode et les grands hôtels voient le jour, notamment dans le sud de la France. C’est ainsi que le grand chef manage les fourneaux du Grand Hôtel à Monte Carlo, sous la direction de César Ritz.
Leur collaboration les conduit à mettre en œuvre une hôtellerie de grand luxe à destination des artistes célèbres et des aristocrates. Fait notoire, on accueille désormais les femmes dans les salles de restaurant. Ils sévissent ensuite au Savoy de Londres, où Escoffier n’hésite pas à servir des cuisses de grenouille. Outre son esprit créatif, il fait preuve de miséricorde en remettant aux Petites Sœurs des Pauvres les restes de nourriture non consommés lors des soupers.
Après avoir été évincés du Grand Hôtel pour vols et corruption, Ritz et Escoffier font construire leur propre hôtel, le Ritz à Paris, puis l’année suivante le Carlton à Londres. C’est là qu’Escoffier perfectionnera son art et sa méthode en dirigeant 60 cuisiniers au service de 500 couverts par repas.
Ils créeront ensuite de nombreux établissements sous la marque Ritz – Carlton en Europe et Outre-Atlantique et mettront en place des brigades sur les paquebots transatlantiques. Le grand chef sera également sollicité pour les évènements d’importance comme le dîner du Couronnement de Georges VII ou le pique-nique de Dos Santos lors de son premier vol public.
Le taylorisme en cuisine
L’organisation scientifique du travail n’en était encore qu’à ses prémices qu’Auguste Escoffier la mettait déjà en œuvre dans ses cuisines, au sein de ses brigades de cuisine. Avant lui, les cuisines des grands restaurants présentaient des conditions de vie très difficiles :
- chefs coléreux jusqu’à la brutalité,
- absence d’organisation,
- boisson et tabac,
- chaleur insupportable, etc.
Auguste Escoffier, profitant de ses prérogatives de chef de cuisine, réorganise le travail aux fourneaux :
- port de l’uniforme obligatoire,
- interdiction de fumer et boire de l’alcool,
- spécialisation des tâches,
- gain de productivité et de temps.
Pour se distinguer et établir son leadership face à ceux qui constituent désormais sa brigade de cuisine, il arbore une toque haute, qui compense avantageusement sa petite taille.
Côté salle, il affiche les premiers menus à prix fixes, allège l’assiette et simplifie les plats. Le grand chef cuisinier français impose sa vision nouvelle de la cuisine gastronomique, plus adaptée aux nouveaux modes de vie de ses convives, de grands hommes d’affaires et des aristocrates.
Auguste Escoffier, l’empereur des cuisiniers, maître des saveurs
Auguste Escoffier, reconnu comme ambassadeur de la cuisine française, est décoré de la Légion d’Honneur, un an avant de prendre sa retraite dans sa région d’origine. Au cours de sa carrière, il a formé un grand nombre des disciples d’Escoffier. En reconnaissance, ceux-ci lui offriront un dîner de gala à l’occasion de son 80ème anniversaire.
A 82 ans, il fonde la World Association of Chefs Societies, destinée à « faire progresser la profession et tirer parti de l’influence de la veste de chef pour le bien de l’industrie et de l’humanité en général ».
De nombreux grands chefs français les plus connus l’ont pris en référence dans leurs créations. Parmi les chefs étoilés français, Alain Ducasse, Joël Robuchon ou encore Paul Bocuse.
La cuisine française à déguster et à lire
Auguste Escoffier est un inventeur. Il aime créer de nouveaux plats pour ses convives. Il est ainsi le père incontesté de nombreux plats et desserts, car la pâtisserie l’inspire autant que la cuisine. Le maître des saveurs crée une recette par mois en moyenne.
Parmi les préparations culinaires de sa création, on trouve de multiples jus, fonds et sauces qu’il décrit parfaitement dans son ouvrage « Ma Cuisine ». Mais on connaît aussi très bien quelques-unes de ses recettes :
- la Poire Belle-Hélène, créée en hommage à l’opéra éponyme d’Offenbach,
- la Pêche Melba, inspirée par Dame Nellie Melba, une cantatrice en vogue,
- les Crêpes Suzette, du nom de la jeune femme qui accompagnait le futur roi Edouard VII.
Il a produit de nombreux écrits, notamment son « Guide culinaire » et son « Livre des Menus ».
Le célèbre cuisinier est élevé au rang d’Officier de la Légion d’Honneur par Edouard Herriot. Il est, sans conteste, le maître de la gastronomie française. Grand visionnaire, communiquant et manager, il serait fier de savoir le patrimoine gastronomique français inscrit au Patrimoine de l’Humanité par l’UNESCO.